Le Collectif Orientation appuie son action sur un diagnostic de la situation de l’éducation à l’orientation en France. Notre analyse repose sur 5 constats principaux :
1. Un environnement professionnel en profonde mutation
Nous évoluons actuellement dans ce qu’il est coutume d’appeler un « monde incertain ». Notre environnement professionnel est soumis à des évolutions rapides sous l’action de profonds changements structurels d’ordre technologiques, démographiques, climatiques, sociaux, etc.
Le développement croissant d’emplois atypiques, la multiplication des ruptures dans les carrières sont autant de facteurs d’insécurité qui tendent à affecter une part croissante des jeunes qui s’engagent sur le marché du travail.
Dans un contexte multipliant les facteurs d’insécurité, l’éducation à l’orientation est amenée à évoluer. Il ne s’agit pas tant d’inciter les élèves à s’engager dans une carrière que de leur apprendre à comprendre le contexte professionnel, savoir identifier les opportunités, gérer les imprévus et faire des choix tout au long de leur vie.
85% des emplois de 2030 n’existent pas encore aujourd’hui
Source : Emerging technologies impact on society & world in 2030 – Dell Technologies et Institute for the Future
Selon Pôle Emploi, les jeunes actifs d’aujourd’hui changeront en moyenne 13 à 15 fois d’emploi au cours de leur vie
Source : Évolution des modes de travail, défis managériaux : comment accompagner entreprises et travailleurs ? – Sénat, 2021
2. Un besoin crucial d'accompagnement des jeunes
Les premiers concernés expriment très clairement un sentiment d’inquiétude et le besoin d’un meilleur encadrement dans leurs choix d’orientation. C’est ce qui ressort de toutes les enquêtes récentes sur le sujet menées auprès des jeunes.
86 % des jeunes se déclarent inquiets quand ils pensent à leurs choix d’orientation
Source : Baromètre de confiance en l’avenir des jeunes – BVA pour l’Étudiant, 2022.
1 jeune sur 2 n’a pas le sentiment d’être ou d’avoir été bien accompagné dans ses choix d’orientation
Source : Baromètre de confiance en l’avenir des jeunes – BVA pour l’Étudiant, 2022.
1 jeune sur 2 est d’accord avec l’affirmation « Si j’avais su qu’une autre voie ou un autre cursus existait, j’aurais fait des choix différents »
Source : Enquête auprès des jeunes de 17 à 23 ans sur leurs choix d’orientation et leur rapport à l’avenir – Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et Chemins d’Avenir, 2019.
3. L’orientation, une priorité relative pour l’école
Comme le souligne le Sénat en 2022, l’orientation à l’école se trouve dans une position paradoxale : « clé de voûte du nouveau système, mais parent pauvre de l’éducation nationale ». Un nouveau cadre législatif et institutionnel a favorisé l’accompagnement à l’orientation :
- la loi de septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel,
- le Parcours Avenir au collège,
- l’accompagnement personnalisé au lycée,
- la responsabilité accrue donnée aux régions dans la découverte des métiers et des filières de formation sur leur territoire.
Aujourd’hui, en théorie, des heures sont dédiées à l’accompagnement à l’orientation tout le long de la scolarité des enfants au collège et au lycée. Les enseignants, et en particulier les professeurs principaux, se retrouvent en première ligne pour assurer ces nouvelles missions. Pour autant, ils se sentent mal informés, formés et accompagnés pour les accomplir efficacement.
24 % des professeurs principaux de terminale estiment encore que l’orientation ne fait pas partie de leurs attributions
Source : Sondage CSA pour la Cour des comptes, 2019.
85% des professeurs principaux et 65 % des proviseurs n’ont reçu aucune formation spécifique pour exercer leur mission d’orientation
Source : Rapport du Sénat établissant le « bilan des mesures éducatives du quinquennat », 2022.
Seuls 22% des jeunes interrogés citent les professeurs comme leur inspirant confiance pour les aider dans leurs choix d’orientation
Source : Baromètre de confiance en l’avenir des jeunes – BVA pour l’Etudiant, 2022.
4. L’École et ses partenaires, une complémentarité à structurer
L’éducation à l’orientation ne se conçoit qu’en profonde coordination avec la réalité du tissu professionnel. C’est d’ailleurs l’une des dimensions du Parcours Avenir, conçu par l’Éducation nationale, qui sert de cadre de référence et qui « vise à faciliter et développer les échanges entre l’École et les acteurs du monde économique, notamment locaux ».
« Il va falloir amener les entreprises au sein des collèges, et créer de vrais liens avec les professeurs principaux, si l’on veut que cette politique publique soit efficace, mais l’Éducation nationale en aura-t-elle les moyens ? ». Kamel Chibli, président délégué de la Commission « éducation – orientation » de Régions de France
Source : La Gazette des Communes
Pour faciliter ce rapprochement, de nombreux acteurs, notamment issus du monde associatif, se mobilisent pour proposer aux établissements scolaires une interaction directe entre élèves et professionnels.
64 % des jeunes ont l’impression de manquer de contacts avec des professionnels des secteurs qui les intéressent pour faire leurs choix d’orientation
Source : Baromètre de confiance en l’avenir des jeunes – BVA pour l’Etudiant, 2022.
La découverte concrète des métiers serait pour 70% des jeunes de 3ème une priorité
Source : Enquête de l’AFEV auprès d’élèves de 4ème et de 3ème scolarisés en éducation prioritaire, 2018.
Pourtant, ces actions sont aujourd’hui peu lisibles, éparpillées et déployées sans concertation, multipliant les coûts investis et rendant plus difficile la mesure de leur impact. Cela accroît in fine un sentiment de confusion pour les enseignants, désormais au cœur du dispositif d’orientation au sein de l’établissement.
5. Des inégalités perpétuées par l’orientation des jeunes
L’origine sociale des élèves influence fortement leurs trajectoires d’orientation. Les parents, avec leurs propres biais, jouent un rôle central dans ce processus, tandis que l’école peine encore à remplir pleinement sa mission émancipatrice auprès de tous les élèves. Les jeunes s’adressent alors principalement à leur famille pour acquérir de l’information, orienter leurs choix, trouver un stage, etc.
Près de 60% des jeunes déclarent avoir fait appel à l’aide de la famille pour trouver leur stage de 3ème
Source : Enquête de l’AFEV auprès d’élèves de 4ème et de 3ème scolarisés en éducation prioritaire, 2018.
La famille est citée comme l’acteur qui inspire le plus confiance aux jeunes pour les aider dans leurs choix d’orientation
Source : Baromètre de confiance en l’avenir des jeunes – BVA pour l’Etudiant, 2022.
Or les familles sont très inégalement équipées pour répondre à cette demande. Certaines cumulent les difficultés : connaissance de l’environnement professionnel, accès à des informations fiables, mobilisation du réseau, etc. Leurs enfants ont alors plus de chance de suivre une orientation qui ne leur correspond pas.
En conclusion
Il est important d’offrir aux jeunes un réel accompagnement de qualité dans leurs choix d’orientation :
- au sein de l’école pour en assurer l’accès à tous dans des conditions équitables ;
- en relation étroite avec le monde professionnel pour s’adapter au mieux aux évolutions rapides de l’environnement ;
- avec le soutien de la société civile pour épauler les enseignants.
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